Le ministre japonais du commerce extérieur

Publié le par Monsieur Guy

Le ministre japonais du commerce extérieur de Murray Schisgal


Traduction et mise en scène de Stéphane Valensi Scénographie d'André Acquart assisté de Flore Guillemonat

 Marc Berman (Roger Eichelberry), Bartholomew Boutellis (Skeeter Chichinsky),  William Edimo (D.P Anderson), Nathalie Grauwin (Juliet Mac Kenzie), Daniel Kenigsberg (Docteur George Porter), Nathalie Lacroix (Marguerite), Matthieu Marie (Hakara / Léo), Ariane Pawin (Amy), Juliette Savary (Toshiba / Sonia) Marc Schapira (Peter Chichinsky)


Théâtre 13/Jardin, 103A Bd Auguste Blanqui – 75013 jusqu'au 16 décembre


 Maire en tête, la nomenklatura d'une petite ville des Etats-Unis  attend la venue du ministre japonais du commerce extérieur.  De cette visite ils espèrent  et attendent beaucoup, miroitant chacun l'opportunité d'un enrichissement personnel.

 

 Murray Schisgal a écrit "Le ministre japonais du commerce extérieur" en 1992, quinze années avant la crise des subprimes. L'éclatement de la bulle est le cœur de la pièce, il en est la farce. 

 Une farce qui nous fait tant rire, nous spectateur, mais qui dans un même temps nous amène à penser le pourquoi et le comment de l'agitation des dindons…de cette farce.  Ils veulent s'éclater, s'en mettre plein les fouilles, plein la panse. L'exhibition de leur rêve  de possession  est à la mesure de l'inconscience de ce qui les possède.

 

 Molière avait su  observer les hommes de son temps  et nous rendre visible l'influence qu'exerçaient sur eux les lois de la bourgeoisie naissante. Murray Schisgal  en fin Molière du néo-libéralisme,  nous révèle l'imposture d'hommes et de femmes s'abritant chacun à leur manière derrière la posture   que leur confèrent  leur rôle et leur rang social.

 Si nous pouvons être tentés de trouver des analogies avec d'autres auteurs  (Molière, Tchékhov, Levin, Tilly, Calaferte, en ce qui me concerne), nous devrons vite  reconnaître la singularité d'une écriture qui  n'a  pas fini de nous dévoiler toutes ses richesses de par son étendue et sa profondeur.

 

 

                                      

                                                              Le ministre © Arnaud Regnier-Loilier - 2012

 

 

 Les personnages de Murray Schisgal tout comme ceux d'Hanoch Levin éprouvent la nostalgie de l'enfance en évoquant souvent  l'irréalisation de leurs rêves. Et c'est là qu'apparaît peut-être toute la pertinence et la poésie d'un tel théâtre. Il est tout à la fois jeu et réflexion sur le jeu en nous révélant des êtres en panoplie d'adultes,  mais dévitalisés de leur enfance. Il interroge la place et le rôle même du théâtre en s'approchant au plus près de cette nécessité de faire le  "comme-si" enfantin sur la scène pour interroger le "comme-ça" infantile de nos sociétés.  

 

 Grâce à la mise en scène de Stéphane Valensi, on pense bien sûr aussi aux meilleurs des vaudevilles, où comme ici,  le rythme effréné des protagonistes symbolise leur résistance désespérée à la chute, au vide.

 

 Les références nombreuses à la disneylandisation et à  la société du spectacle,  dans la mise en scène de Stéphane Valensi et la scénographie Play-mobil d'André Acquart, sont en accord parfait avec les enjeux du texte. Et que dire des comédiens, sinon qu'ils sont tous magnifiques dans leur rôle survolté, notamment Marc Berman  en meneur de rêves et l'étonnant Matthieu Marie en ministre japonais. Bravo! 

Publié dans Théâtre

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