Cahin caha
CAHIN-CAHA
de Serge Valletti
Mise en scène : David Géry
Avec : Olivier Cruveiller (en alternance avec Claude Guyonnet) et Christian Drillaud
Au LUCERNAIRE 53 Rue Notre Dame Des Champs 75006 PARIS 06, jusqu'au 24 novembre.
On les croirait de passage, ils pourraient être des spectateurs levés de leurs sièges pour en découdre. Ils sont sur scène, mais est-ce vraiment une scène? La question ne sera pas de savoir pour qui ou pour quoi ils sont là mais plutôt comment ils sont arrivés là?
" Comment on commence ? " s'inquiète Caha. Entre l'insolite et l'absurde, nous voilà baladé dans un quiproquo où le moins que l'on puisse dire est qu'il n'a ni queue ni tête. Face à l'imaginaire débridé de Cahin, Caha oppose un " j'aimerais mieux pas" à la Bartleby. Et à partir de cette dynamique nos deux comparses nous entrainent dans d'incroyables facéties où déraison et raison se disputent l'avantage.
Si, bien sûr, dans ce dialogue on peut percevoir l'imaginaire en marche (celui de l'écrivain, du metteur en scène ou du spectateur), Serge Valletti, par son écriture au scalpel, nous transporte dans une tornade de mots où l'important n'est pas de savoir ce que ça raconte, mais ce que ça dit et que l'on entend par delà les mots. Dans leur vaine tentative de vouloir maîtriser la situation, Cahin et Caha nous révèlent leur incomplétude en nous renvoyant à la nôtre.
Par sa mise en scène, en déstabilisant le rapport scène-salle, David Géry fragilise dans un même temps la place du spectateur, lui offrant aussi la possibilité d'une bienveillante écoute. Car si nous rions beaucoup, ce sera autant au dépens de nos comparses qu'au nôtre.
Le jeu d'Olivier Cruveiller et Christian Drillaud est d'une grande justesse. Evitant l'écueil de la caricature, il donne corps et chairs à ces deux âmes en errance.
Allons voir Cahin-Caha pour rire bien sûr, mais aussi pour voir et entendre dans un même temps la partie de cache-cache que se livrent le vrai et le faux dans le souci constant de s'approcher du juste. Le théâtre en quelque sorte.